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  • Photo du rédacteurCatherine Rolland

Le témoin invisible - de Carmen Posadas


Nicolas II. Raspoutine. Anastasia.


Ces noms vous évoquent certainement quelque chose. De toute l’Histoire de la Russie ou même du monde, la fin tragique des Romanov fait partie de ces drames qui fascinent et horrifient tout à la fois. Le dernier tsar de Russie était meilleur père de famille que stratège politique. De nature effacée, indécise, il manquait de pertinence dans le choix de ceux qui l’entouraient.


Hanté par l’attentat qui avait coûté la vie à son grand père, Alexandre II, alors que lui-même n’avait que 13 ans, il s’attacha durant son règne à sauvegarder l’autocratie par tous les moyens, refusant toute idée de réforme et aveugle aux revendications de son peuple. Forcé à abdiquer par les Bolcheviques en 1917, il sera exilé à Ekaterinbourg avec toute sa famille, où ils seront finalement exécutés en juillet 1918.


Le meurtre de l’empereur et de sa femme, mais aussi de leurs cinq enfants et de leurs derniers fidèles ; l’extrême violence d’un massacre où les agonisants furent achevés à la baïonnette ; l’impossibilité, des années durant, de localiser précisément l’endroit où les corps avaient été inhumés ; le fantôme de Raspoutine, enfin, moine illuminé aux prétendus dons de guérison ; tout ceci contribua à forger une légende qui fascine encore, un siècle plus tard.


De cette tranche d’histoire très fréquemment traitée en littérature, au cinéma ou à la télévision, Carmen Posadas tire un roman à la fois dense et passionnant. Son narrateur, Leonid Sednev, a réellement existé. Âgé d’une quinzaine d’années en 1918, il faisait partie des derniers domestiques attachés au tsar et à sa famille. Employé aux cuisines, il est le seul à avoir été épargné, renvoyé chez lui quelques heures seulement avant la terrible nuit du 17 juillet.


Si, dans la vraie vie, Sednev n’a semble-t-il jamais raconté les souvenirs de sa jeune existence au service des Romanov, l’auteure a choisi de faire découvrir à son lecteur les dernières années de la famille avec ses yeux d’« invisible ». Très documenté, d’une grande rigueur historique, l’ouvrage reste agréable à lire et très accessible, le parti-pris narratif atténuant son effet « documentaire ».


L’intrigue et son issue étant connues, aucune surprise n’attend le lecteur, mais « Le témoin invisible » plaira certainement aux adeptes de romans historiques et à tous ceux que la Russie et ses mystères captivent. Au-delà du destin de l’empereur et de sa famille, Carmen Posadas décrit la genèse de la révolution russe et la montée au pouvoir de Lénine et de ses partisans, ainsi que les bouleversements d’un monde en profonde mutation, d’une façon tout aussi intéressante.


Une bien plaisante façon d’apprendre ou réapprendre l’Histoire, sans même s’en apercevoir.


Catherine Rolland


Le témoin invisible – Carmen Posadas – Ed. Points - 480 pages


Retrouvez Catherine Rolland sur son blog : www.catherine-rolland.com


89 vues1 commentaire

1 Comment


Unknown member
Jan 28, 2022

Je suis très intéressée par cette période, ayant fait des recherches sur le prince Youssoupov. Merci pour ce commentaire brillant et concis

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